S’IL Y A TANT DE CHÔMAGE, C’EST LA FAUTE AUX CHÔMEURS !

Publié le par Pierre Robès

S’IL Y A TANT DE CHÔMAGE, C’EST LA FAUTE AUX CHÔMEURS !

Hallucinant ce qui se passe dans les medias mainstreams !

Une « note de travail » a fuité et s’est retrouvée, comme par hasard, au « Canard Enchaîné » !

On détaille dans cette note tout ce que Jupiter envisage comme mesures pour lutter contre le chômage.

Et il est même interviewé sur les télés à ce sujet,

Et il en rajoute une belle couche en faisant « comme si c’était fait ».

Ce n’est donc pas une « fake news » !

Il est vrai qu’avec la majorité que les électeurs lui ont donnée à l’Assemblée Nationale, il peut faire comme bon lui semble…

Ainsi donc les chômeurs seront impitoyablement fliqués : Fort bien, tout le monde applaudit, les chômeurs n’ont qu’à se mettre au boulot dans l’Hôtellerie/Restauration et le BTP, là où il manque tant de bras !

Bandes de fainéants !

Toutes et tous à la plonge ou derrière la bétonnière !

Un peu réducteur comme raisonnement : Brouetter du béton à 60 ans… ou former mémé aux emplois de demain !

L’un des problèmes de fond quand on parle de chômage et de formation, c’est qu’on mélange allègrement des choux et des carottes, des torchons avec des serviettes, bref absolument tout et, comme à l’accoutumée, on s’attaque aux effets parce que c’est plus facile que de s’attaquer aux causes.

D’abord, comme le soulignait fort justement quelques interlocuteurs pour une fois compétents sur LCI l’autre soir, il y a le problème de la formation initiale.

Les filières « générales » forment des individus qui ont le baccalauréat pratiquement toutes et tous, mais qui, globalement,  ne savent qu’à peine lire et écrire (compter n’en parlons même pas) et qui sont incapables de situer Limoges sur une carte de France, ou plus simplement de citer les fleuves Français !

Quant aux filières « bac pro », c’est tout simplement une catastrophe, inutile de se voiler la face, tous les professionnels de l’enseignement le constatent, ces pauvres gosses sont quasiment analphabètes.

Comment, dès lors, faire croire qu’il sera possible, via la formation, de « récupérer » tous ces sinistrés de la « non Education Nationale » ?

Commençons donc par le commencement, c’est-à-dire par l’excellence de l’enseignement de base. Il « semble » à cet égard, que, grâce à son nouveau Ministre, l’Education Nationale soit enfin redescendue sur terre.

Ensuite, il y a la très grande opacité qui règne dans le secteur de la gestion de la formation.

Pendant la campagne électorale, il a été fait largement allusion, et à juste titre, au RSI, cet organisme qui gère de façon « exotique » les cotisations des travailleurs indépendants.

En matière de formation, c’est le RSI puissance exponentielle, via ces organismes paritaires de branche dénommés OPCA : Organismes Paritaires Collecteurs Agréés.

Il y a 20 OPCA qui font strictement toutes le même métier et offrent les mêmes sévices, pardon, services, à quelques nuances fondamentales près, 20 RSI si vous préférez.

Pour leurs frais de fonctionnement, les OPCA gardent un maximum légal de 7,4% des fonds collectés des entreprises au titre de la formation professionnelle continue, soit 6,7 milliards d’euros en 2016.

Ces 20 OPCA se partagent donc, pour leur fonctionnement, environ 500 millions d’euros chacune, soit en moyenne 25 millions par OPCA !!!

Quelles prestations rendent ces OPCA ?

Rigoureusement les mêmes : Essentiellement la collecte des fonds, la gestion administrative des dossiers, la réception et le contrôle des factures des organismes de formation, le paiement aux organismes, le tout dans un cadre rigoureusement précis et contrôlé par la DIRECCTE.

Pas tout à fait cependant : pour les formations longues (les contrats de professionnalisation sur deux ans, par exemple), certaines OPCA acceptent des factures mensuelles, d’autres exigent des factures trimestrielles (parfois même calées sur les trimestres civils !) et les délais de paiement sont relativement aléatoires, souvent à 90 jours date de facture !

Au surplus, certaines OPCA acceptent que les organismes de formation cèdent leurs factures à des sociétés d’affacturage (moyen de financement très onéreux, mais sans alternative possible pour les centres disposant de faibles fonds propres), d’autres l’interdisent (c’est le cas de l’OPCA des banques !!!).

Ajoutons enfin que la gestion des dossiers est quasiment totalement dématérialisée : Tout se fait par internet et il faut s’armer de patience pour trouver un interlocuteur compétent par téléphone, comme c’est le cas bien souvent actuellement.

On voit donc là qu’il y a des économies de quelques centaines de millions à faire au simple niveau de la gestion administrative…

A l’armée, « dans le temps », on faisait tourner les camions dans la cour de la caserne sans aucune autre raison que celle de voir le budget « Gas-oil » consommé afin qu’il soit reconduit l’année suivante.

Dans ce secteur, on fait tourner les OPCA.

En matière de formation, il en va souvent ainsi : On forme à tout et n’importe quoi pour « épuiser le budget » dans le cadre de formations complètement « bidon » et inutiles.

En voici un exemple vécu.

Il y a quelques années, j’ai eu connaissance d’une formation longue et à plein temps au commerce international de chômeurs en reconversion inscrits à Pôle Emploi.

On trouvait dans cette formation des populations très diverses et très disparates en termes d’âge, de vécu professionnel, de niveau d’études, d’origines sociales et « géographiques » (il ne faut plus employer certains mots…), mais des gens très motivés.

Deux sessions de suite, les formateurs ont  réussi à remettre le pied à l’étrier de quasiment tous les participants et à les réinsérer dans le système : La plupart ont trouvé un travail, d’autres ont continué des études, d’autres sont repartis à l’étranger avec un vrai bagage.

On pouvait alors se dire « mission accomplie » : Une trentaine de personnes sauvées sur 2 ans, c’est pas trop mal.

Et puis la troisième année, formation supprimée par le centre…

Je me souviens avoir fait part de mon étonnement à la directrice du centre en lui faisant observer que l’on avait réussi à réinsérer tous ces chômeurs. « Oui, me répondit-elle, mais pas tous en commerce international, les résultats ne sont donc pas satisfaisants ».

Tout bonnement désespérant…

Cher Monsieur Macron, faire de la formation un outil efficace, ce n’est pas une question de financement.

Si on ne change pas les mécanismes de gestion de la formation (une seule OPCA et des délégations régionales, par exemple) et si on n’adapte pas la formation aux besoins concrets des entreprises et des besoins ressentis par celles et ceux (pour parler comme vous) qui sont en contact avec les chômeurs, c’est-à-dire les gens de Pôle Emploi, on continuera à dépenser tout ce bel argent en pure perte.

Enfin, pas pour tout le monde puisque les principaux acteurs de la gestion de la formation (et donc les bénéficiaires de cette belle masse d’argent) sont les représentations patronales et syndicales qui verrouillent absolument tout dans ce secteur et en profitent pour placer toutes les copines et tous les copains avec un tel niveau d’incompétence qu’il faut l’avoir vécu pour y croire !

Et puis, s’il est fondamentalement vrai que la formation est un très puissant vecteur de valeur ajoutée tant pour les individus que pour les entreprises, ce n’est pas la formation qui créée des emplois !

Alors mettre 10, 15, 20 milliards de plus dans la formation, c’est bien gentil, mais qui paiera, pour faire quoi et comment ?

Tant que les dirigeants de ce pays, élus par les abrutis que nous sommes, ne fonctionneront que dans la communication et les effets d’annonces, on ne sortira pas de l’auberge…

Pierre Robès    Pierre Robès

 

Publié dans Pierre ROBÈS

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