BERNARD DEBRÉ : L’HOMME AU DEVOIR D’ALERTE !
C’est un grand médecin et un authentique parlementaire qui nous quitte ce 13 septembre à l’âge de 75 ans des suites d’un cancer… Son frère, le journaliste François, décède le lendemain…
Urologue, ministre, député, fils de Michel Debré, il fut l’agitateur gaullien d'une droite qui le décevait à tous les égards.
Un de ses derniers combats fut d’accuser l’industrie pharmaceutique dans Dépressions, antidépresseurs : le guide, où il les accuse de recycler sans cesse les mêmes molécules, pour les vendre dix fois plus cher, et les médecins de prescrire à tour de bras des antidépresseurs inutiles dans 80 % des cas.
Quelques années précédentes son Guide des 4.000 médicaments utiles, inutiles ou dangereux lui a valut une condamnation par le Conseil de l’Ordre des médecins, ce ‘‘machin’’ créé par le régime de Vichy… avec interdiction pendant un an d’exercer pour cause de « non-confraternité » Inouï ! Suite aux très nombreuses réactions tous azimuts, la sanction a été commuée en blâme et de nombreux placebos dé-remboursés.
Debré : une famille illustre
Robert Debré, le grand-père, révolutionna la pédiatrie moderne et fonda l'Unicef.
Michel, le fils, résistant, est chargé par le général de Gaulle d'établir la liste des préfets qui remplaceront ceux du régime de Vichy pour le jour de la Libération. Il rédigea la Constitution de la V°République, fonda l'ENA et fut le 1er chef du gouvernement de 1959 à 1962.
Bernard, suit les traces de son Grand-Père en choisissant la médecine. Urologue réputé, il devient chef de service à l'hôpital Cochin, participe à la mise au point de la thérapie génique.
François Mitterrand fut opéré dans son service…
Deux fois l’an, Bernard Debré emmenait son équipe en mission humanitaire en Afrique, en Afghanistan, au Pakistan…
Gaulliste de cœur et d’actions, il est élu député en 1986. Alors que son frère Jean-Louis rejoint la Chiraquie, il choisit Balladur qui est pour lui le plus fidèle des héritiers du Gaullisme.
François Mitterrand l’impose au gouvernement de cohabitation sous Chirac : il sera ministre de la Coopération, sillonnant l'Afrique francophone.
Plus tard, dissident de l'UMP, afin « d’en finir avec le système Chirac », il est brillamment élu à Paris siégeant pendant 13 ans.
Ne manquant pas d’humour, à la question de Thierry Ardisson : "Bernad Debré, quel est lieu idéal pour une étreinte ?", il répond sans langue de bois : « Au bloc opératoire ! », suscitant l'hilarité sur le plateau de l'émission.
Il reprendra son combat pour le contrôle des médicaments, le dépistage du cancer, la lutte contre les ravages des stupéfiants tout en continuant d’opérer bénévolement une fois par mois à l’étranger.
Dans un livre paru en 1997 ‘‘L'Illusion humanitaire’’, il précise « Dans le monde d'aujourd'hui, des milliers d'hommes et de femmes méritent le qualificatif d'humanitaires. Beaucoup d'entre eux sont des anonymes, isolés au sein de petites organisations locales. Ce ne sont pas ces individus, dignes de notre respect, que je tiens à accuser avec vigueur. Ce sont les politiques..., ce sont les grandes organisations..., ce sont certains médias..., ce sont les complicités croisées, qui finissent par construire un mur d'irréalité, d'idéalisation ».
Il décrit les échecs de l'ONU, montre l'alibi que représentent les causes humanitaires pour les grosses puissances et évoque aussi la politisation des organisations non gouvernementales (ONG), l'humanitaire business…
Autre dérive de l'humanitaire qu’il dénonce : le spectacle. Tel humanitaire a été filmé sac de riz sur l'épaule, et plusieurs prises furent nécessaires pour obtenir la meilleure mise en scène…
Tel politique s'est montré dans l'enceinte d'une école, expliquant son action, alors qu'il venait dans ce pays africain pour la première fois…
Bernard Debré prône un nouvel humanitaire fondé sur l'éthique et le courage international.
Laissons le dernier mot au patron des Républicains, Christian Jacob : « Professeur et élu de la Nation, c’est avec la même énergie que Bernard Debré soignait les maux de ses patients et ceux de ses concitoyens ! »
La petite Souris Normande