VALERY GISCARD D'ESTAING (4/6 )

Publié le par VILDENAY

VALERY GISCARD D'ESTAING (4/6 )

Fin de l’immigration économique

La politique de Valéry Giscard d'Estaing en matière d'immigration se caractérise par la fin de la politique d'incitation à l'immigration et par le renforcement du contrôle des entrées et des séjours sur le territoire national.

Après son élection à la présidence, un secrétariat d'État aux Travailleurs immigrés, confié à André Postel-Vinay, est créé. C'est sous l’impulsion du Président de la République que le gouvernement suspend, en juillet 1974, l'immigration des travailleurs et des familles désireuses de rejoindre un de leurs membres en France, à l'exception des ressortissants de la Communauté européenne.

Question du regroupement familial

Alors qu’il est mis un terme à l’immigration économique, le Premier ministre, Jacques Chirac, signe le 29 avril 1976 un décret qui reconnaît le droit au regroupement familial. Cette possibilité est réservée aux travailleurs étrangers séjournant régulièrement sur le territoire français et se voit assortie d’une série de conditions (durée de résidence, ressources, logement, ordre public, santé). Les familles algériennes sont par ailleurs automatiquement exclues du dispositif.

Le 10 novembre 1977, l’exécutif - qui continue à estimer trop élevé le niveau d’immigration en France - suspend pour trois ans l'application du décret du 29 avril 1976. Dans un contexte de hausse du chômage, le gouvernement décide d’autoriser le regroupement familial seulement à des personnes qui ne demanderont pas l'accès au marché du travail en France.

Le 8 décembre 1978, saisi par le Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI) de tendance socialiste, le Conseil d'État annule, sur la base notamment des alinéas 5 et 10 du préambule de 1946, le décret de 1977 et consacre le « droit de mener une vie familiale normale » en principe général du droit. Cette décision du Conseil d'État a des conséquences déterminantes sur le long terme et ouvre la voie à une « immigration de peuplement ».

Bien qu’ayant rapidement restreint le droit au regroupement familial, Valéry Giscard d'Estaing confiera en 2018 que cette mesure constitue « le plus grand regret » de sa présidence, déplorant avoir vu « arriver des noyaux familiaux totalement différents » de ceux que la France connaissait jusqu’alors.

Autres tentatives de réduire l'immigration

La politique d'immigration de Valéry Giscard d'Estaing est également marquée par l'encouragement aux retours volontaires des immigrés dans leur pays d'origine avec la mise en place, en 1977, d'une aide financière au retour de 10.000 francs et, en 1978, d'un système de retours d'une partie de la main d'œuvre étrangère.

L'historien et politologue Patrick Weil, spécialiste des questions d'immigration et de citoyenneté, révèle en 2015 que Valéry Giscard d'Estaing, devant l'échec de la politique d'aides financières au retour, prône une politique de retour forcé.

À partir de 1978, il avait l'intention, selon les travaux de Patrick Weil, de « dénoncer les accords d'Évian, qui permettaient la libre circulation entre la France et l'Algérie » et de « changer la loi pour permettre l'arrêt des titres de séjour, ou la non-reconduite des titres de séjour de ceux qui étaient là depuis dix, quinze ou vingt ans ».

Il promulgue, en janvier 1980, la loi relative à la prévention de l'immigration clandestine, dite loi ‘‘Bonnet’’. Ce texte renforce les conditions d'entrée sur le territoire français, permet l'éloignement des immigrés en situation irrégulière et leur détention dans un établissement pénitentiaire pendant un délai pouvant aller jusqu'à sept jours s'ils ne peuvent quitter immédiatement le territoire. Le 14 octobre 1980, Lionel Stoléru, secrétaire d'État auprès du ministre du Travail et de la Participation (Travailleurs manuels et Immigrés), affirme « qu'il n'est plus question d'accueillir un seul étranger en France ».

Le 10 mai suivant, à un an de l'élection présidentielle, le Parti Socialiste, le PSU, la LCR, la CFDT et la Ligue dite, des droits de l'homme, participent à une marche de protestation contre le projet de loi Stoléru sur le renouvellement des cartes de séjour et de travail et contre le projet d'Ornano codifiant l'accès aux foyers collectifs. Ils critiquent également une circulaire rendant plus difficile l'inscription des étudiants étrangers dans les universités françaises. Cette circulaire est défendue par le Premier ministre, Raymond Barre, qui dénonce « l'afflux d'étudiants étrangers fantômes qui ne sont là que pour mener une action publique orientée contre leurs pays d'origine ».

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Politique sociale et de relance

Plusieurs mesures sociales sont prises :

-le minimum vieillesse est majoré de 21 % à partir du 1er juillet 1974,

-l'âge légal de départ à la retraite est abaissé à 60 ans pour deux millions de personnes au métier pénible.

-une allocation supplémentaire d'attente (ASA), permettant aux individus licenciés pour motif économique de percevoir 90% de leur salaire pendant un an, est créée.

Le septennat de Valéry Giscard d'Estaing sera surtout marqué par les conséquences des deux chocs pétroliers, qui brisent la dynamique des Trente Glorieuses.

En réponse à la nouvelle situation économique, il opte d'abord pour un plan de lutte contre l'inflation, qui s'élève à 16,8% en 1974.

Le Premier ministre, Jacques Chirac, est alors favorable à un plan de relance, ce à quoi s'oppose le ministre des Finances. Le président tranche finalement, en 1975, en faveur d'un plan de soutien à l'économie de 30 milliards de francs (15 milliards pour les investissements publics, 10 milliards de mesures fiscales et 5 milliards de crédits accordés aux familles nombreuses et aux personnes âgées).

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Mesures d’austérité

Lorsque Raymond Barre est nommé Premier ministre, l'inflation et le déficit extérieur s'accroissent, tandis que le franc, mis en difficulté, a dû quitter le Serpent monétaire européen en mars 1976, huit mois après l'avoir réintégré.

Valéry Giscard d'Estaing charge alors le nouveau chef du gouvernement de rétablir les grands équilibres économiques. Celui-ci, qui a pour objectif affiché de combattre l'inflation et de maintenir la stabilité de la monnaie, décide de mettre un terme à toute politique de stop and go (politique restrictive avec baisse de l'inflation, puis politique de relance afin de réduire l'augmentation du chômage provoquée par la politique précédente, puis à nouveau politique restrictive afin de diminuer l'inflation, et ainsi de suite). Il restera fidèle à ces principes jusqu'à la fin du septennat.

Le ‘‘plan Barre’’ du 22 septembre 1976 prévoit la limitation des hausses des salaires, le gel des prix à la consommation pour trois mois et des tarifs publics pour six mois, l'abaissement du taux de TVA sur certains produits de 20% à 17,6%, l'augmentation de l'impôt sur le revenu de 4% à 8% pour les ménages les plus aisés, ainsi que des prix de l'alcool et de l'essence. Ces mesures visent à lutter contre le chômage et à assurer une meilleure compétitivité des entreprises françaises ; le gouvernement mise sur l'appui du patronat pour maintenir le pouvoir d'achat moyen des ménages.

Un deuxième plan austérité est lancé en avril 1977. Il met en place plusieurs mesures sociales pour accompagner la restructuration de l'industrie et l'assouplissement du marché du travail. Cette politique de rigueur est attachée à l'image du Premier ministre, qui n'hésite pas à déclarer que la faible productivité de la sidérurgie dans le bassin lorrain doit se traduire par la baisse du nombre d'emplois ou encore que « la politique du gouvernement ne se détermine pas en fonction de la longueur d'un cortège » de manifestants.

Le 19 avril 1978, Raymond Barre, inspiré par les résultats de l'économie ouest-allemande, se prononce en faveur « d'un libéralisme social et des règles de l'économie de marché ». La concurrence et la liberté des prix sont alors privilégiées : les prix industriels sont libérés dès cette année 1978, suivis de ceux des services l'année suivante. Cette politique libérale, critiquée par les syndicats, se différencie du Programme commun de la gauche et de l'interventionnisme gaulliste. Concernant le financement de l'économie, la majorité met en place une politique favorable à l'épargne avec une réduction d'impôt en cas d'investissement dans des sociétés d'investissement à capital variable (SICAV).

Sous le septennat de Valéry Giscard d'Estaing, le taux de prélèvements obligatoires en proportion du PIB passe de 33,5% à 39%.

Le levier fiscal est d'abord utilisé, entre 1974 et 1978, pour réguler la conjoncture, puis, en fin de septennat, pour atteindre l'équilibre budgétaire.

L'impôt sur les plus-values est instauré, mais Valéry Giscard d'Estaing avancera par la suite que le Parlement, en l'incorporant dans l'assiette de l'impôt sur le revenu au lieu d'en faire un impôt forfaitaire, dénaturera son initiative.

Le barème de l'impôt sur le revenu pour 1980 ne prévoit pas la revalorisation de toutes les tranches à hauteur de l'inflation, ce qui alourdit l'imposition de nombreuses ‘‘classes moyennes’’.

La politique d'austérité du gouvernement Barre est menacée par le deuxième choc pétrolier, qui se traduit par la multiplication du prix du pétrole par 2,7 entre 1978 et 1981. Valéry Giscard d'Estaing privilégie, en juillet 1979, l'adoption de nouvelles mesures de rigueur à l'hypothèse d'un plan de ‘‘refroidissement’’ de l'économie repoussé après l'élection présidentielle de 1981.

La croissance annuelle de la France, qui dépasse les 3%, est alors l'une des plus élevées au monde, tandis que le pouvoir d'achat des Français continue à croître.

L'historien Jean-Charles Asselain souligne que ‘‘l'ensemble des indicateurs témoigne d'une diminution effective des inégalités’’, principalement en raison de ‘’l'alourdissement de la fiscalité sur les tranches supérieures de revenu et sur les successions importantes’’.

Les déficits budgétaires sont maîtrisés et la dette publique de la France, qui oscille autour de 20% du produit intérieur brut, est sensiblement la même à la fin qu'au début du septennat.

Cependant la politique de lutte contre l'inflation ne produit pas les effets escomptés, en particulier avec les effets du deuxième choc pétrolier, et le chômage de masse apparaît. C'est pendant le mandat présidentiel de Valéry Giscard d'Estaing que le cap du million de chômeurs est franchi. Pour faire face à cette hausse du chômage, qui s'explique en partie par les gains de productivité et l'accroissement de la population active, le gouvernement prend des mesures, comme l'instauration en 1979 du contrat de travail à durée déterminée en France (CDD), qui sont jugées insuffisantes par une partie grandissante de la population.

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Politique industrielle

À l'instar des autres pays européens, la désindustrialisation touche la France pendant le septennat de Valéry Giscard d'Estaing, ce qui conduit des dizaines de sidérurgistes à manifester dans les rues de Paris.

Après avoir mis fin à la patente, qui frappe essentiellement les commerçants, l'exécutif instaure la taxe professionnelle, qui va imposer beaucoup plus lourdement l'industrie.

Valéry Giscard d'Estaing décide de poursuivre et d'intensifier le programme de développement de l'énergie nucléaire civile engagé par son prédécesseur.

En 1976, la construction du super-générateur nucléaire nommé Superphénix est décidée, et la Compagnie générale des matières nucléaires (COGEMA) et l'Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN) sont créés.

En matière industrielle, il engage la modernisation du transport ferroviaire en lançant l'étude sur le train à grande vitesse. En 1974, débute la modernisation du réseau téléphonique avec le triplement des lignes sur sept ans. Devant la nécessité d'économiser l'énergie, le gouvernement restaure, en 1976, l'ancien changement d'heure pendant les mois d'été, mesure permettant une économie d'électricité pour l'éclairage du soir.

(suite demain)

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