UNE ÉTUDE TACLE LA GAUCHE URBAINE BIEN-PENSANTE
La population citadine, que l’on croit ouverte sur le monde, accepterait en fait bien moins les opinions des autres que la droite campagnarde, supposée pourtant plus étroite d’esprit, selon une étude européenne.
Les conclusions d’une grande étude européenne risquent de faire grincer pas mal de dents du côté de la gauche politique. En effet, l’enquête tord le cou au cliché qui affirme que la population urbaine, de gauche, serait plus ouverte d’esprit que la population campagnarde, de droite, qui n’accepte pas d’autres opinions politiques. Car dans la réalité, ce serait tout l’inverse.
L’étude, menée par le «Mercator Forum Migration une Demokratie» à Dresde (D), conclut que plus une personne est éduquée, riche, urbaine et de gauche, moins elle accepte les personnes qui ont une autre vision du monde. À l’inverse, les personnes qui ont une attitude conservatrice, qui vivent à la campagne et qui ont moins d’argent et d’éducation, sont plus ouvertes envers ceux qui pensent différemment.
Division et compromis difficile
Et les auteurs de l’étude sont sévères : l’intolérance de la gauche vis-à-vis des autres opinions a des conséquences, selon eux. Elle conduit à cette société divisée que l’on déplore des États-Unis, à l’Allemagne, en passant par Israël et la Suisse.
Pourtant, la polarisation n’est pas une mauvaise chose en soi, estiment-ils. Le fait qu’il existe des opinions politiques différentes, voire contradictoires, est indispensable aux démocraties, selon eux. « Ce qui est décisif, c’est la tolérance vis-à-vis des opinions divergentes, qui fait partie des fondements d’une démocratie moderne. Et c’est justement cette tolérance que la gauche semble perdre », critiquent-ils sévèrement.
Conséquence, selon l’étude: il devient toujours plus difficile de trouver des compromis politiques. La raison en est qu’une certaine vision du monde n’est plus seulement considérée comme une attitude politique, mais de plus en plus comme une partie de l’identité personnelle. Tout devient alors personnel. Corollaire : celui qui pense autrement est rapidement perçu comme une menace. La réaction est alors le scepticisme, la défense et l’exclusion. En d’autres termes : « On ne supporte plus les adversaires aux opinions différentes ».
En Suisse, «la gauche se considère dans son bon droit»
L’étude a été menée auprès de 20.000 personnes dans 10 pays, mais pas en Suisse. Mais selon le politologue Michael Hermann, interrogé par la SonntagsZeitung, les résultats seraient similaires chez nous. « Comme la gauche prétend s’engager pour le bien, pour les faibles et les minorités, elle se considère plutôt dans son bon droit - elle a donc le droit de s’en prendre à ceux qui sont du ‘mauvais’ côté », explique-t-il.
Christine Talos est journaliste depuis 1998. Correspondante parlementaire à Berne, elle couvre notamment l'actualité politique suisse et économique. Passionnée de photo, elle prête aussi ses clichés à certains sujets.