CONTRE LE DÉVELOPPEMENT ANARCHIQUE DE L’ÉOLIEN: UN COLLECTIF DE 500 MAIRES VEUT DONNER LA PAROLE AUX ÉDILES
Vent des maires, créé en 2021, compte plus de 1000 membres dont 523 maires et une cinquantaine de sénateurs, députés ou conseillers régionaux. Le plus important pour ce collectif d’envergure nationale, c’est de redonner la parole aux maires afin que ces derniers puissent agir en fonction de l’opinion de leurs concitoyens en ce qui concerne l’éolien.
« Je ne suis pas objectif puisque je suis anti-éolien », reconnaît Michel Couder, maire de Courcival dans la Sarthe. Même son de cloche chez Pierre-Emmanuel Picard, porte-parole de Vent des maires, simple citoyen qui habite dans ce petit village d’une centaine d’habitants. Tous deux sont des membres fondateurs du collectif qu’ils ont créé avec Brigitte Pistre, maire de Frazé (Eure-et-Loir).
Lors d’un entretien avec Epoch Times, le maire de Courcival et Pierre-Emmanuel Picard remarquent que même si leurs positions sont clairement contre l’éolien, le collectif ne réclame pas le droit de faire arrêter un projet de parc éolien. « Ce qu’on demande, c’est la parole aux maires, ce n’est pas le droit de veto. On ne demande pas que les maires aient le pouvoir de dire non, on demande qu’ils aient la parole », précise le porte-parole.
« On préfère qu’ils disent non, évidemment, mais on veut qu’ils aient le pouvoir de dire oui ou de dire non », assure-t-il.
Une montée en puissance rapide
Lorsqu’ils ont créé Vent des maires en 2021, « c’est monté rapidement en puissance », se souvient l’édile. Dans un contexte de prolifération des projets éoliens et d’une très forte opposition, de nombreux maires se sont joints au groupe. « On a eu aussi pas mal de députés et de sénateurs qui ont rejoint le collectif, des associations et des conseillers municipaux », explique Pierre-Emmanuel Picard. « On a été aidés indirectement par les prises de position de Stéphane Bern », se réjouit-il.
En effet, le célèbre journaliste a cité l’organisme dans une tribune contre les éoliennes publiée dans Le Figaro fin mai 2021 : « Les gens sont vent debout, comme d’ailleurs quelque 500 maires réunis dans un collectif, Vent des maires, qui s’indignent du déni de démocratie. »
Pas d’autre collectif de maires de cette envergure
Plus de 500 maires ont en effet adhéré très vite au collectif, ce qui est assez exceptionnel puisque, selon le chargé de communication de l’organisme, les édiles français n’ont pas tendance à se regrouper au sein d’associations. En particulier quand le sujet porte à polémique, « les maires des petites communes préfèrent voir les gens les uns après les autres plutôt que d’adhérer à un collectif. »
« Le collectif Vent des maires avec ses plus de 500 maires est quelque chose d’important. Il n’y en a pas d’autre finalement en France qui ont cette taille », estime Pierre-Emmanuel Picard, qui pense que l’organisme représente encore bien plus de monde que ce que le nombre d’adhérents montre directement. « Je connais, ne serait-ce qu’à dix kilomètres d’ici, des maires qui ne sont pas adhérents à Vent des maires mais qui nous suivent régulièrement et qui nous soutiennent. »
En plus des édiles de petites communes, ceux de villes plus importantes sont devenus membres du collectif, par exemple Gilles Lurton de Saint-Malo, Nicolas Langlois de Dieppe ou encore Robert Ménard de Béziers.
En avril 2021, les deux maires fondateurs de Vent des maires ont écrit une lettre ouverte au président de la République. Le groupe informe aussi régulièrement tous les édiles de France par le biais d’avis, de courriers, de prises de position.
« On ressent qu’on a plutôt la loi contre nous »
Selon Michel Couder, c’est quand les maires sont confrontés à des projets éoliens sur leur commune ou sur les communes avoisinantes qu’ils se tournent vers Vent des maires afin d’obtenir de l’aide ou des conseils. Cela part toujours d’un combat local et de la constatation que tout seul, un maire n’a pas vraiment de moyens d’action pour empêcher l’implantation d’éoliennes sur son territoire, même s’il y a une forte opposition parmi la population.
« On ressent qu’on a plutôt la loi contre nous, c’est-à-dire que le préfet et la loi sont de façon générale très favorables à l’implantation des éoliennes », remarque Pierre-Emmanuel Picard. « Dans la plupart des cas, le pouvoir est totalement entre les mains soit du préfet, soit des tribunaux ».
Selon l’expérience de Vent des maires, pour arriver à se faire entendre, il faut avoir « une prise de position locale très hostile », mais aussi le soutien de la communauté de communes, d’associations importantes, de personnalités telles que des sénateurs, des députés ou encore des conseillers départementaux. « Si on arrive à avoir tous ces gens là contre un projet, il est clair que c’est plus difficile pour le promoteur et pour le préfet d’imposer un projet contre des populations qui se révoltent. »
Un problème de démocratie universel, jusqu’au Québec
Il y a quelques mois, les membres du bureau de Vent des maires ont eu la surprise d’être contactés par des élus du Québec qui voulaient s’inspirer du collectif français pour en créer un équivalent de l’autre côté de l’océan. C’est ainsi que Vent d’élus a vu le jour au mois d’août 2023. « La raison en est simple : c’est qu’on a vu que leurs problèmes sont, en résumé, les mêmes que les nôtres », explique Pierre-Emmanuel Picard.
Le maire de Courcival ajoute que cela prouve que le problème de démocratie est universel : « Ce n’est pas uniquement un problème français, donc demander l’avis aux gens, ce n’est pas uniquement dans la Sarthe, c’est partout. » Il espère que les gens pourront décider de leur avenir et de leur environnement ensemble sans se le faire imposer.
« Si vous en acceptez une, vous êtes sûrs d’en avoir dix ou vingt »
Vent des maires prévient que le principal problème des éoliennes, c’est leur prolifération massive. Un, deux ou trois de ces immenses mâts, cela peut être beau aux yeux de certains et cela peut être discutable, même si personne n’a envie de les avoir dans son jardin, peu importe qu’on y soit favorable ou pas. « Ce dont on ne peut pas discuter, à mon avis, c’est quand il y en a 100 ou 200. Là, il n’y a plus de discussion possible », assure le porte-parole.
La problématique, c’est que les petits projets se transforment toujours en plus gros projets, en tout cas c’est la tendance observée par le collectif. Une fois les premières éoliennes installées, les industriels voudront en ajouter des dizaines aux alentours afin de bénéficier des réseaux déjà installés. À ce moment-là, les communes n’ont pratiquement plus aucun pouvoir pour les leur interdire.
« Si vous en acceptez une, vous êtes sûr que, dans les années qui suivent, vous allez en avoir dix ou vingt », assure Michel Couder, se rappelant de ses vacances dans les Hauts-de-France, une région qui a une densité incroyable d’éoliennes. « C’est inimaginable », se souvient le maire. « La région est terrassée. La région devient à notre avis inhabitable », commente Pierre-Emmanuel Picard.
Les conseils d’un maire
Voici les conseils du premier magistrat de Courcival à un maire qui se trouverait confronté à un problème d’implantation d’éoliennes sur sa commune. Ce genre de projets crée la zizanie dans une communauté, étant donné les intérêts financiers énormes qu’ils génèrent.
« Le souci, c’est que, souvent, les gens réagissent quand ils ont le problème sous le nez », remarque l’édile. Tout d’abord, il est nécessaire d’agir rapidement parce que dès qu’on laisse un peu de pouvoir au promoteur, « c’est sûr qu’il s’engouffre là-dedans et après c’est difficile de revenir en arrière ».
Ce qui est « indispensable et essentiel », c’est que la commune et le conseil municipal commencent par donner un avis défavorable au projet. La plupart du temps, les éoliennes sont implantées sur des terres privées, alors ensuite « il faut aller voir les propriétaires pour discuter avec eux du bien-fondé » et leur montrer les conséquences, recommande l’édile. L’étape suivante est d’expliquer le projet à la population pour que celle-ci puisse prendre position pendant l’enquête publique. Le maire doit aussi discuter avec le commissaire enquêteur puisque c’est lui qui va donner un avis final sur le projet.
En résumé, « il faut absolument, au niveau de la commune, être très mobilisé et mobiliser les gens », conseille le maire de Courcival. Son acolyte du bureau de Vent de maires ajoute : « Il faut se battre ; les collectifs, les mairies, les citoyens doivent se battre pour se faire entendre ».