LES DONNEURS DE LEÇONS DEVRAIENT BALAYER DEVANT LEURS PORTES
Durant la campagne européenne et aujourd’hui pour les législatives, une meute anti-RN s’évertue à faire croire à une hérédité entre J.M. Le Pen et le Président actuel Jordan Bardella. Il est bon de rappeler que J.M. Le Pen créateur du Front national en 1972 a été exclu du FN en 2015 par les instances présidées par Marine Le Pen. Ses déclarations provocatrices le qualifiaient logiquement de raciste et d’antisémite. Il était aussi un anti-gaulliste primaire. Ce sont les raisons essentielles pour lesquelles je l’ai toujours combattu.
A partir de ce constat, est-il interdit de voir un parti politique évoluer dans son expression politique et ses propositions ? Bien sûr que non !
Et pourtant les donneurs de leçons, à défaut d’être d’accord entre eux sur tous les sujets, et je pense évidemment aux composantes diverses voire divergentes du ‘‘nouveau Front populaire’’ organisé fondamentalement autour de LFI, devraient regarder leurs histoires passées. Si on leur appliquait le même principe héréditaire, qu’en penseraient-ils ? Un peu de décence, d’humilité, de vérité.
Du socialisme à la collaboration avec l’Allemagne nazie
Parmi les personnages ayant franchi le Rubicon, le plus connu est incontestablement Pierre Laval, avocat défenseur des organisations syndicales, député socialiste (SFIO) de 1914 à 1919, président du conseil dans les années 30, puis chef du gouvernement de Pétain de 1942 à 1944, champion de la collaboration avec les Allemands pendant l’occupation.
D’autres exemples : Paul Faure, membre du gouvernement de Léon Blum en 1936, votera les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain le 10 juillet 1940, mais aussi d’autres responsables SFIO que l’on retrouve pour certains dans les cabinets ministériels pétainistes : Ludovic Zoretti (Également militant CGT), Georges Albertini, Georges Soulès… Il ne faut pas oublier Marcel Déat, député SFIO de 1926 à 1928.
Plus près de nous : les socialistes ne sont-ils pas les ‘‘enfants de François Mitterrand’’ décoré de la Francisque n° 2202 remise par Pétain en personne (1943) ? Que penser de ces héritiers de celui qui était l’ami caché de René Bousquet, l’antisémite, directeur général de la police qui organisa la rafle du Vel d’hiv en juillet 1942 ?
Le parti communiste et le pacte germano-soviétique
Le PCF n’assume pas son histoire. Et pourtant il convient de rappeler sa position au début de la guerre 39-45. L’accord établi entre l’Allemagne nazie et l’URSS communiste est signé le 24 août 1939 à Moscou. ‘‘Pacte germano-soviétique’’[1] ou ‘‘Traité de non-agression entre l’Allemagne et l’URSS’’.
Le chancelier allemand annonce son intention d’envahir la Pologne fin août 39 et propose à Staline la signature de ce pacte de non-agression entre les deux puissances. Ce Pacte est la traduction officielle des négociations.
Mais d’autres accords secrets organisaient les sphères d’influence et le partage des territoires conquis par les deux contractants : Scandinavie, Pays Baltes, Pologne, Roumanie, Finlande après l’invasion de la Pologne en septembre par les deux belligérants alliés pour la circonstance. Cette alliance permettait aussi à Hitler de concentrer sur le front ouest toutes ces forces, un front à l’est devenant inexistant à la suite de cet accord.
Le Parti Communiste français inféodé à Moscou soutient fermement ce Pacte. L’Humanité du 25 août 1939 titre à la « une » : « L’action de l’Union soviétique par le Pacte de non-agression avec l’Allemagne concourt à raffermir la paix générale ».
Les 44 députés communistes favorables au Pacte se retrouvent au sein du Groupe ouvrier et paysan jusqu’au 21 janvier 1940, date à laquelle est votée par l’Assemblée nationale et le Sénat la déchéance des députés qui n’ont pas rompu avec le PCF. Sans tous les citer, retenons quelques-uns qui seront déportés et emprisonnés en Algérie jusqu’en 1942[2] : François Billoux, Florimond Bonte, Ambroise Croizat, Antoine Demusois, Etienne Fajon, Jacques Grésa, Pierre Lareppe, Georges Lévy, Lucien Midol, Arthur Musmeaux, Albert Petit, Louis Prot, Waldeck Rochet, André Mercier… Ce Pacte prend fin le 22 juin 1941, du fait de la décision d’Hitler d’attaquer l’URSS en déclenchant l’opération Barbarossa. C’est à partir de cette date que le mouvement communiste entre en résistance totale aux puissances de l’axe.
L’URSS rejoint alors le camp allié. Nous pouvons nous poser la question : que ce serait-il passé si Hitler avait respecté ce pacte de non-agression ? Quelle décision le PCF aurait-il pris ? Il n’est pas question de faire de l’histoire-fiction. Est-il besoin de rappeler le cas de Maurice Thorez qui déserte pendant toute la guerre à Moscou.
Ne sont-ils pas les héritiers des courants marxistes incarnés par Lénine, Staline qui, pour le PCF, a été le plus grand défenseur des droits de l’homme ! Mieux vaut en rire.
Les Français n’ont pas une mémoire de poisson rouge.
[1] Ce Pacte est signé par les Ministres des Affaires étrangères respectifs, Joachim Von Ribbentrop pour l’Allemagne et Viatcheslav Molotov pour l’URSS. Staline présent lors de la signature déclare : « Je sais combien la nation allemande aime son Führer, c’est pourquoi j’ai le plaisir de boire à sa santé » et jure « sur sa parole d’honneur que l’Union soviétique ne trahira pas son partenaire ».
[2] Ils seront libérés après le débarquement allié en Afrique du Nord par les résistants gaullistes.
Alain Kerhervé