MARATHON SUR UN CHAMPS DE MINES
Il aura fallut plus de 50 jours pour qu’Emmanuel Macron nomme un Premier Ministre. Avant cela l’hypothèse la plus sérieuse était d’envoyer Bernard Cazeneuve à Matignon. Il cochait toutes les cases. Il est socialiste, il a été Premier Ministre. Il est intelligent et a la réputation de détester le sectarisme. Olivier Faure en a jugé autrement privant son parti de l’occasion unique d’avoir enfin un premier ministre de gauche. Il est fort probable qu’au prochain congrès du PS le premier secrétaire paie très cher cette bévue.
Donc le choix du Président s’est fixé sur Michel Barnier. L’ancien ministre qui a été deux fois commissaire européen, décrit par les uns comme un ‘‘dinosaure’’, par les autres comme un ‘‘crétin des Alpes’’, ne partait pas sous les meilleures auspices…
Et pourtant , on sait qu’en politique il faut se méfier des ‘‘papes de transition’’ qui finissent par durer plus longtemps que prévu…
Certes il bénéficie, pour l’instant, de la bienveillance attentive de Marine Le Pen. Certains ont même dit qu’il avait un pistolet sur la tempe. En fait, le Rassemblement National, qui compte 11 millions d’électeurs, s’offre une opportunité supplémentaire de passer pour un parti responsable qui ne censurera que pour motif grave.
Quel contraste avec la gauche, ou plutôt une certaine gauche, qui prône l’agitation, la destitution, la démission, mais qui apparaît, le reconnaitra-t-elle un jour, comme le dindon de la farce…
Mais le plus dur sera sans doute pour Emmanuel Macron qui fait bonne figure mais se retrouve à composer avec tout ce qu’il a combattu. L’ancien monde n’existait plus face à la start up nation. Or voici un vieux parlementaire (il n’a jamais eu d’autres métiers) qui semble décidé à ne pas se laisser marcher sur les pieds et qui sait très bien qu’il est attendu au virage par l’Europe sur le budget, par la gauche sur les retraites, par la droite sur l’immigration, autant dire que le parcours de Michel Barnier évoque plus le marathon sur un champs de mines que la promenade de santé.
À son âge, c’est courageux d’accepter un tel poste. Souvenons-nous des plus jeunes disant que Matignon est un enfer et qui sortaient épuisés de ce qu’ils assimilaient à une terrible épreuve. Le connaissant depuis longtemps, j’ai la faiblesse de penser qu’il est mu par l’intérêt général et par une certaine idée de la France. C’est curieux mais je le trouve grandi d’avoir dit oui au Président.
La France va mal, elle sort d’une période olympique où beaucoup d’athlètes se sont dépassés dans l’effort, c’est une raison d’espérer qu’elle sorte de l’ornière.
Daniel JUBERT
Conseiller Départemental de Louviers
Vice-Président d'Eure Normandie Numérique