SUR LE ZINC, A SOULVIRE, UN SAMEDI MATIN…

Publié le par la-petite-souris-normande.com

zinc

La scène se déroule à côté de la place du marché de Soulvire, un samedi  en fin de matinée.

René, Marcel et Jean-Edouard, tous trois retraités, ont l’habitude de s’y retrouver chaque semaine pour l’apéro, pour commenter les nouvelles et pour refaire le monde….pour vivre, quoi !

René est un ancien ouvrier d’usine, communiste depuis toujours et farouchement syndicaliste. Il a connu toutes les grandes luttes, de la 7ème semaine de congés-payés aux 25 heures payées 40.

Marcel, quant à lui, est un ancien boucher, formé à l’ancienne comme apprenti, qui a « travaillé toute sa vie », comme il dit. Il goûte désormais une retraite bien méritée. Certes, sa retraite de commerçant est microscopique, mais Marcel a su « faire ce qu’il fallait pour mettre de côté » le nécessaire. De temps à autre, Marcel donne encore un coup de main à des collègues « entre deux ».

Jean-Edouard a, lui aussi, « bossé toute sa vie » : Entré comme apprenti à 14 ans dans le salon de coiffure « Chez Dédé, toujours bien coiffé », il a ensuite gravi  tous les échelons pour finir sa carrière comme « premier garçon coiffeur » du plus renommé salon de Soulvire, celui que fréquente toute la gentry Soulviroise.

 

« Déniaisé » très jeune dans l’arrière-boutique, Jean-Edouard a vite compris que ses orientations sexuelles n’étaient pas « comme les autres ». En fait, Jean-Edouard est homosexuel. C’est lui que ses amis appellent affectueusement « Jean-Ed, la Grande folle », ce que Jean-Ed assume parfaitement sereinement.

Parfois nos trois compères sont rejoints par Mohammed, dit « Momo ». Mohammed est, lui aussi, un ouvrier retraité. Parti très jeune de sa montagne, il a connu cet âge d’or industriel où on massait les ouvriers d’usine dans des foyers plus ou moins sordides et où 11 mois sur 12 des cars venaient les chercher pour les conduire au travail puis les ramener.

Momo n’a pas de famille, il n’a pas voulu retourner au bled.

Cette semaine a été particulièrement agitée avec « toutes ces affaires » et René, arrivé le premier, attend de pied ferme ses deux amis.

Pour tromper son impatience, René a commandé un premier Ricard et discute avec Georges, le patron du bistrot.

Georges est un patron de bistrot tout à fait classique : Rubicond et rondouillard, le crâne dégarni, Georges, comme tout bon patron de bistrot, se plaint sans cesse.

Actuellement, son « cheval de bataille », ce sont les impôts et les taxes.

Georges est très fier de son dernier bon mot : « T’as vu, ils taxent la bière, y feraient mieux de taxer les cercueils ! ».

Ce à quoi René, qui n’a pas la langue dans la poche, répond tout de go : « le cercueil, on y va tout droit ! ».

Mais voici Marcel qui arrive.

« Salut Viandox » dit René à l’adresse de son ami.

 

Oui, parfois, en allusion à son teint particulièrement rougi par les trop nombreux canons et pour faire référence à son ancien métier, Marcel est affectueusement surnommé ainsi.

 

Sans se démonter, Marcel rétorque prestement :

« Tiens, c’est Pâques, les cocos sont de sortie, Georges un ballon de Côtes du Rhône ! »

Ces amitiés viriles ne s’embarrassent pas de fioritures….

A propos de fioritures, arrive Jean-Edouard.

Jean-Edouard a coutume de ponctuer ses entrées d’un vibrant « Bonjour mes petits chéris ! ».

Jean-Ed est toujours d’une belle élégance : Grand, élancé, tiré à quatre épingles, c’est surtout son abondante chevelure frisée qui attire le regard.

Ce matin, sa teinture est parfaitement réussie : un blond vénitien avec des reflets dorés du meilleur effet  (*).

C’est Jean-Ed qui attaque le premier ce matin, après avoir commandé son lait fraise bio.

S’adressant à Marcel : « Dis, mon chéri, tu as pensé à déclarer tous tes comptes en Suisse ? »

 

Suite au prochain numéro…

 

(*) NDLR  : grand, élancé, une abondante chevelure frisée, un ton précieux, Jean-Ed me fait  vaguement penser à quelqu’un, mais je ne vois pas qui…

 

Publié dans LE CASAR D'HUMOUR

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